De l’encadrement des technologies mobiles en classe pour un engagement actif des étudiants

L’usage des technologies mobiles en classe (de l’ordinateur portable à la tablette en passant par le téléphone cellulaire) est un enjeu pour nombre d’enseignants qui voient leurs étudiants centrés sur d’autres tâches que les activités d’apprentissage proposées. Pourquoi et comment encadrer l’usage des technologies mobiles en classe? C’est l’objet de cette réflexion dans laquelle deux outils sont proposés pour faciliter la communication des usages attendus en classe.

Mise en situation

Luc a enseigné à l’université avant que les TIC et les technologies dites « intelligentes » ne fassent partie du paysage universitaire. Pas technophobe, mais pas non plus technophile, Luc prend toujours soin de mettre en place un climat de classe propice aux apprentissages de ses étudiants et de créer une relation pédagogique très forte avec eux.

Alors que ses étudiants s’engagent lorsqu’il les met dans des situations d’apprentissage actif, Luc se rend compte que certains naviguent sur Internet pendant une démonstration complexe et que d’autres utilisent leur téléphone cellulaire à différentes fins. Il intervient de plus en plus souvent pour signifier verbalement à ses étudiants de rester concentrés. Luc sent également que plusieurs étudiants sont agacés par l’utilisation abusive des téléphones cellulaires et des ordinateurs par certains de leurs camarades.

Désarmé, Luc sévit à la moindre occasion et va même jusqu’à menacer de confisquer les objets perturbateurs. De leur côté, les étudiants manifestent leur désapprobation en insistant sur le fait qu’ils peuvent faire plusieurs choses en même temps (suivre le cours, faire une activité, répondre à leurs messages et naviguer sur Internet). Entre Luc et les étudiants commence alors une guerre psychologique quant à l’usage du téléphone cellulaire en classe. La suspicion règne également quant au bon usage des tablettes et des ordinateurs. Comment Luc peut-il encadrer l’usage des technologies mobiles en classe sans entrer dans une guerre sans fin?

 

*Le genre masculin utilisé dans ce document désigne aussi bien les femmes que les hommes et n’a pour but que d’alléger le texte

Pourquoi?

CINQ RAISONS POUR ENCADRER L’USAGE DES TECHNOLOGIES MOBILES EN CLASSE

  1. Bien que les écrits valorisent l’intégration du numérique dans les milieux universitaires (Collin et Saffari, 2017), l’utilisation des tablettes, ordinateurs et téléphones cellulaires en classe est un enjeu de plus en plus important pour des enseignants (Weston, Sana et Wiseheart, 2014).
  2. Les tablettes, ordinateurs et téléphones cellulaires sont régulièrement utilisés par les étudiants à des fins autres que pédagogiques, affectant ainsi leurs résultats scolaires (Fried, 2008).
  3. Les usages inappropriés des technologies mobiles s’invitent de plus en plus dans les activités d’apprentissage actif et ont une influence sur la dynamique de la classe.
  4. Les enseignants se sentent parfois démunis face aux étudiants qui font un usage inapproprié des technologies mobiles en classe.
  5. Ces usages inappropriés sont d’ailleurs au cœur de préoccupations institutionnelles (Université Laval, 2016 ; Université de Montréal, 2013).

Quoi?

VOUS AVEZ DIT « ENCADRER L’USAGE DES TECHNOLOGIES MOBILES EN CLASSE » ?

TIC, technologies mobiles ou mode de communication électronique sont au cœur de grandes questions pédagogiques. Dans ce contexte, l’encadrement des tablettes, téléphones cellulaires et ordinateurs semble inextricablement lié à la gestion de classe. Encadrer l’usage des technologies mobiles en classe revient essentiellement à donner des repères clairs aux étudiants afin d’encourager une utilisation appropriée des outils qui font leur quotidien.

Ce que nous dit la recherche

DE LA DÉFINITION D’ATTENTES CLAIRES À LA RECHERCHE D’UN CERTAIN ÉQUILIBRE

La recherche démontre que les technologies mobiles seraient un levier à l’apprentissage (Collin et Saffari, 2017). Cependant, celle-ci aborde peu les inconvénients inhérents à une mauvaise utilisation de ces TIC et l’influence que cette mauvaise utilisation peut avoir sur le climat d’apprentissage et la gestion de classe (Weston, Sana et Wiseheart, 2014). Si les enseignants sont toujours encouragés à bien planifier leur séance de cours et leurs activités d’apprentissage, ils sont également invités à communiquer aux étudiants leurs attentes quant à l’utilisation des technologies mobiles en classe et l’influence d’un usage non approprié sur le climat d’apprentissage dans la classe. Les conditions d’utilisation et les justifications devraient être précisées dans le plan de cours et faire l’objet d’une discussion en classe (Université Laval, 2016).

TIC

Comment?

DEUX OUTILS POUR ENCADRER LES TECHNOLOGIES MOBILES EN CLASSE

Alors que généralement aucune règle ne régit l’utilisation des technologies mobiles en classe, il semble toutefois pertinent de réfléchir aux bonnes pratiques que les enseignants universitaires pourraient adopter et de proposer un outil qui permettrait d’encadrer l’usage que font les étudiants des téléphones cellulaires, tablettes et ordinateurs à des fins pédagogiques. Il n’est donc pas ici question d’interdire l’usage des technologies, mais bien de l’encadrer. Cependant, comme tout encadrement, celui-ci demande avant tout à l’enseignant universitaire de mettre en place une gestion efficace des technologies mobiles en classe, en aidant l’étudiant à comprendre ce qu’est un usage approprié de celles-ci.

À l’aide d’icônes et de vignettes, l’enseignant universitaire est invité à mettre en place les balises les plus adaptées à son enseignement en classe, à sa tolérance à l’égard des technologies mobiles ou encore à la planification de ses activités d’enseignement-apprentissage.

1. Les icônes

 

 

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Figure 1 : Icônes (HEC Montréal, 2017) : Moment réservé pour usage sur la tâche, Moment hors technologies mobiles, Moment toléré pour usage hors-tâche

Lorsqu’il planifie son cours et ses activités d’enseignement-apprentissage, l’enseignant universitaire peut identifier trois moments particuliers d’utilisation des technologies mobiles en classe grâce à trois icônes (Figure 1). Par exemple, dans le plan de cours, l’icône correspondant peut indiquer les activités d’apprentissage au cours desquelles l’utilisation de l’ordinateur portable est interdite (lors de la venue d’un conférencier, lors d’un débat organisé ou encore lors d’une simulation).

Par ailleurs, certaines tâches (p. ex. : une activité à faire en équipe au cours de laquelle les étudiants auraient à faire une recherche documentaire, à vérifier des informations, à résumer la séance du cours) sont toutes indiquées pour préciser aux étudiants que l’usage des technologies mobiles est toléré.En plus d’aider à structurer une séance de cours, les icônes aident également les étudiants à se préparer et à savoir ce qui est attendu d’eux à un moment spécifique.

2. Les vignettes

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Figure 2 : Exemples de vignettes (HEC Montréal, 2017)

Les vignettes peuvent être insérées à même une présentation PowerPoint. Elles peuvent être affichées dès les premières minutes d’une séance de cours. Des rappels réguliers peuvent être faits lors de moments cruciaux de certaines séances. Il est donc conseillé de présenter les vignettes les plus appropriées au contexte de l’enseignant lors de la première séance de cours pour leur expliquer les attentes et les règles imposées dans la classe. Au fur et à mesure de la session, quelques vignettes pourront également être insérées lors des transitions entre les activités d’enseignement-apprentissage pour faire un rappel ludique des attentes et des comportements attendus quant à l’usage approprié des technologies mobiles en classe.

Finalement…

L’objectif de cette réflexion est essentiellement de proposer deux médiums à travers lesquels les enseignants universitaires pourraient encourager un usage approprié des technologies mobiles en classe. À cet effet, communiquer des attentes quant à l’usage des technologies mobiles en classe est essentiel. Toutefois, il ne faut pas oublier que, quelles que soient les attentes des enseignants universitaires, les étudiants ont besoin qu’on les leur répète régulièrement.

Références

Collin, S. et Saffari, H. (2017). Le numérique en pédagogie universitaire. Le Tableau, 6(2).

Fried, C. B. (2008). In-class laptop use and its effects on student learning. Computers & Education,50(3), 906-914. https://doi.org/10.1016/j.compedu.2006.09.006

HEC Montréal. (2017). Balises imagées pour un encadrement personnalisé des technologies mobiles en classe. Ressources pédagogiques.

Université Laval. (2016). L’utilisation des appareils mobiles en classe : aspects pédagogiques, enjeux et pistes d’intervention. Comité de valorisation de l’enseignement. 

Université de Montréal. (2013). Les technologies mobiles en classe : Encadrer leur utilisation pour soutenir l’apprentissage des étudiants. Conseil des études de premier cycle. Rapport déposé à la Commission des études de l’Université de Montréal. 

Weston, T., Sana, F. et Wiseheart, M. (2014). Effets directs et indirects de l’utilisation multitâche du portable en classe en enseignement supérieur. Pédagogie Collégiale, 27(2), 32-34.

Pour en savoir plus

  • CAPRES (Consortium d’animation pour la persévérance et la réussite en enseignement supérieur), dossier thématique sur la gestion de classe à l’aide du numérique;
  • Langan, D., Schott, N., Wykes, T., Szeto, J., Kolpin, S. Lopez, C. et Smith, N. (2016). Students’ use of personal technologies in the university classroom : analysis of the perceptions of the digital generation.Technology, Pedagogy and Education, 25(1), 101-117. https://doi.org/10.1080/1475939X.2015.1120684

D'autres questions à explorer

  • Comment aider les étudiants à avoir un usage responsable des technologies mobiles ?
  • Y a-t-il une limite raisonnable à l’usage des technologies mobiles en classe ?
  • Comment imposer cette limite raisonnable à l’usage des technologies mobiles pendant un cours ?

Notices biographiques

Claire Moreau vient d’obtenir son doctorat en sciences de l’éducation. Ses intérêts de recherche portent notamment sur l’expérience d’apprenants aux parcours universitaires non-traditionnels. Comme conseillère pédagogique, elle soutient les enseignants universitaires dans leur développement professionnel et développe formation et matériel dans le but de répondre à leurs besoins.

Catherine Bigras-Dunberry est titulaire d’une maîtrise en technologie éducative et conceptrice pédagogique à HEC Montréal. Ses intérêts portent sur l’apprentissage multimédia, l’apprentissage en ligne, la classe inversée et la conception d’outils pour le développement professionnel enseignant.

Mentions de responsabilité

Cette capsule est une production de la Direction du soutien aux études et des bibliothèques (DSEB) en collaboration avec le Groupe d’intervention et d’innovation pédagogique (GRIIP)

Comité éditorial : Martine De Grandpré, Alain Huot, Céline Leblanc, Marie-Michèle Lemieux et Lucie Charbonneau

Coordination : Marie-Michèle Lemieux

Rédaction : Claire Moreau et Catherine Bigras-Dunberry

Correction : Isabelle Brochu et Corinne Ducharme

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