Expérimenter l’apprentissage actif : entre perception et réalité

Article

Deslauriers, L., McCarty, L. S., Miller, K., Callaghan, K. et Kestin, G. (2019). Measuring actual learning versus feeling of learning in response to being actively engaged in the classroom. PNAS, 116(39), 19251-19257. www.pnas.org/cgi/doi/10.1073/pnas.1821936116

Résumé

Cet article relate une étude menée par des chercheurs de l’Université Harvard portant sur la comparaison entre les apprentissages réels réalisés par les étudiants et leur perception de ces apprentissages en contexte d’apprentissage actif.

Deslauriers, McCarty, Miller, Callaghan et Kestin (2019) ont mené une recherche expérimentale auprès de 149 participants, tous étudiants dans un cours d’introduction à la physique de l’Université Harvard. Le protocole de recherche a été répété sur deux trimestres différents. Brièvement, les chercheurs ont divisé aléatoirement les étudiants en deux groupes dont l’un a reçu un enseignement magistral (passif) et l’autre a expérimenté un apprentissage participatif (actif) pour une séance de cours pendant le trimestre. Aucune des deux méthodes n’a été introduite ou valorisée auprès des étudiants. Les groupes ont ensuite été confrontés à l’autre posture (active-passive) pour une deuxième séance de cours. Les séances ont été suivies d’un premier questionnaire pour valider les apprentissages des étudiants et d’un second questionnaire pour recueillir leurs perceptions de leurs apprentissages. Les résultats obtenus démontrent que les étudiants en classe active ont appris davantage, mais ont la perception d’avoir appris moins que lorsqu’ils étaient en contexte d’apprentissage passif.

Les chercheurs proposent trois facteurs (dont les deux premiers se retrouvent dans les écrits existants) expliquant les résultats obtenus : 1) l’organisation et la cohérence de l’exposé magistral donnent l’impression aux étudiants qu’ils apprennent; 2) les étudiants novices ont de la difficulté à juger dans quelle mesure ils ont appris; 3) les étudiants non familiers avec l’apprentissage actif ne perçoivent pas les efforts cognitifs soutenus qui accompagnent les méthodes participatives comme un signe effectif de l’apprentissage. Ces facteurs ont été vérifiés à l’aide d’entrevues structurées auprès de 17 participants.

Appréciation et utilisation potentielle

La recherche relatée dans cet article est intéressante puisqu’elle confirme l’efficacité de stratégies pédagogiques actives (la résolution de problème dans ce cas-ci) et établit un parallèle avec la perception des apprentissages des étudiants : un éclairage fort pertinent. Dans la partie discussion, Deslauriers, McCarty, Miller, Callaghan et Kestin (2019) insistent sur l’idée que les étudiants ont une perception plus négative de l’apprentissage actif puisqu’ils y ont vécu un inconfort cognitif. Pour vérifier si cette attitude pouvait être modifiée, les chercheurs ont expérimenté un apprentissage actif accompagné d’explications et données sur l’efficacité de ce type d’activités pédagogiques. Ils ont constaté que les étudiants avaient par la suite une attitude plus favorable vis-à-vis de l’apprentissage actif. En ce sens, les chercheurs rappellent l’importance de discuter avec les étudiants de la pertinence d’une pédagogie favorisant l’apprentissage actif puisqu’ils sont susceptibles, surtout en début de parcours, de se retrouver en déséquilibre face aux nouveaux apprentissages.

Les chercheurs tissent des liens entre les  résultats obtenus et les processus d’appréciation de l’enseignement reçu : les perceptions d’apprentissage des étudiants ne sont pas forcément en faveur des stratégies pédagogiques les plus efficaces. Il s’agit d’un élément qui devrait être discuté au sein des comités qui régissent les activités d’appréciation des enseignements afin que les questions posées aux étudiants reflètent leur expérience d’apprentissage réel.

 

 

Notice biographique

Céline LeblancAprès plusieurs années d’enseignement, Céline Leblanc a entrepris une carrière de conseillère pédagogique en technologie éducative à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) où elle travaille depuis 2008. Dans le cadre de ses fonctions, elle s’intéresse particulièrement à la pédagogie en enseignement supérieur en présentiel. Entre autres, elle coordonne le programme de mentorat entre enseignants et les activités pédagogiques et technopédagogiques offertes à l’UQTR, elle collabore à la communauté de pratique en pédagogie universitaire ainsi qu’à la formation des nouveaux professeurs et des nouveaux chargés de cours de son établissement. Elle est membre du GRIIP depuis 2008 et elle participe aux Lectures choisies, au comité éditorial du Tableau, au comité des Webinaires du GRIIP et a contribué au développement des modules d’autoformation « Enseigner à l’université ».

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